"Aux explorateurs de l’inconnu qui aiment apprendre en faisant un pas en arrière sur le chemin des ancêtres." Pascale Arguedas

Les contes de ma tribu (3) : la lune

Certes, les poètes ont leurs mots à dire (et leurs métaphores à développer), mais que disent à leur tour les conteurs dont les histoires s’ancrent parfois plus profondément ?

Après donc les contes, mythes et légendes racontant l’origine du monde, la nécessité de la parole et le sens du printemps, rassemblons ici ceux qui dévoilent le mystère de cet attracteur étrange céleste.

Une façon aussi de raviver ce rituel convivial de la veillée des « contes de ma tribu ». C’est de saison.

24 Réponses

  1. L’INCESTE

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, La Lune était un homme qui s’appelait Aningak, « frère aîné ». Le soleil était sa soeur et s’appelait Malina, « la poursuivie ». Ils habitaient la baie de Disko, près d’Iloulissat, « le grand fjord des glaces ».

    La Lune, qui était devenue amoureuse de sa soeur, avait pris l’habitude de l’embrasser chaque soir, alors qu’ils jouaient dans la grande maison des fêtes (la maison de neige à toit de peau dans laquelle la jeunesse s’amuse en hiver) à éteindre les lampes. Malina ne pouvait pas voir qui l’embrassait ainsi dans l’obscurité. Pour le savoir, un soir, elle se noircit les doigts de suie et imprima sur le visage et le dos d’Aningak des marques que l’on peut encore voir (les taches de lune).

    Malina et Aningak allumèrent alors chacun une poignée de la mousse qu’on emploie pour les lampes. La flamme d’Aningak était beaucoup moins forte que celle de Malina mais cela ne l’empêcha pas de la poursuivre autour de la maison. Au moment où il s’approcha tout près d’elle, Malina se coupa un sein avec le couteau recourbé des femmes et lui jeta devant les pieds en criant : « Mange-le, puisque tu me convoites tant. »

    Puis Malina, le soleil, s’éleva dans les airs et Aningak, la lune, continua sa poursuite mais ne put jamais monter aussi haut qu’elle.

    (d’après une légende inuit du Goenland occidental, citée par Joseph Ki-Zerbo dans Compagons du soleil, Anthologie de grands textes de l’humanité sur les rapports entre l’homme et la nature, La Découverte/UNESCO, 1992)

    novembre 19, 2009 à 22 h 27 min

  2. Pascale

    J’aime cette légende, peut-être parce que je reviens de la baie de Disko et d’Illullissat…

    novembre 19, 2009 à 22 h 44 min

  3. Isidore

    Raconte ! Raconte, Pascale !

    novembre 21, 2009 à 9 h 40 min

  4. Pascale

    Je te le raconte en photo, Isidore, à ne pas divulguer:
    http://picasaweb.google.fr/Paginaire/2009GroenlandWeb?authkey=Gv1sRgCJ-XoZOLiLvQaQ&feat=email#

    novembre 21, 2009 à 10 h 13 min

  5. Isidore

    Il devrait exister une loi pour interdire de torturer son prochain en lui montrant des photos qui le désespèrent de sa grisaille quotidienne du mois de novembre, en France du nord… Magnifique, ça fait rêver !!!

    novembre 21, 2009 à 12 h 11 min

  6. Pascale

    Merci !

    novembre 21, 2009 à 13 h 41 min

  7. LA TETE COUPEE

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, l’homme s’est coupé le cou et a laissé sa tête là.
    Les autres sont allés la chercher.
    A peine arrivés, ils ont mis la tête dans un sac.
    Plus loin, la tête est tombée sur le sol.
    Ils ont remis la tête dans le sac.
    Plus loin, la tête est encore tombée.
    Ils ont doublé le sac avec un autre sac plus épais.
    Mais la tête est tombée quand même.
    Ils n’ont plus mis la tête dans le sac.
    Ils l’ont laissée au milieu du chemin.
    Ils sont partis.

    La tête a roulé derrière eux.

    Ils ont traversé le fleuve.
    Mais la tête les a suivis.

    […] Ils ont couru.
    Ils ont gagné leur hutte, ont dit aux autres que la tête arrivait en roulant et qu’il fallait fermer la porte.

    Toutes les huttes se sont fermées.
    La tête, une fois arrivée, a ordonné d’ouvrir les portes.
    Les maîtres ne les ont pas ouvertes parce qu’ils avaient peur.

    Alors la tête s’est mise à penser ce qu’elle allait devenir.
    Si elle devenait de l’eau, on la boirait.
    Si elle devenait terre, on la piétinerait.
    Si elle devenait maison, les hommes l’habiteraient.
    Si elle devenait boeuf, on la tuerait puis on la mangerait.
    Si elle devenait vache, on la trairait.
    Si elle devenait farine, on la mangerait.
    Si elle devenait haricot, on la cuirait.
    Si elle devenait soleil, quand les hommes auraient froid, elle devrait les réchauffer.
    Si elle devenait pluie, l’herbe pousserait et les bêtes la brouteraient.

    Alors elle a pensé et elle a dit : « Je vais être lune. »
    Elle a crié : « Ouvrez les portes, je veux emporter mes affaires. »
    Ils n’ont pas ouvert.

    La tête a pleuré. Elle a crié : « Donnez-moi au moins deux pelotes de fil. »
    On lui a jeté les deux pelotes par un trou.
    Elle les a prises et les a lancées vers le ciel.
    Elle a demandé encore qu’on lui jette un epetite baguette pour enrouler le fil et lui permettre de s’élever.

    Alors elle a dit : « Je peux monter, je pars au ciel. »
    Elle s’est mise à monter.

    Les hommes ont tout de suite ouvert les portes.
    La tête allait toujours montant.
    Les hommes ont crié : « Tu t’en vas au ciel, tête ? »
    Elle n’a pas répondu.

    En arrivant au Soleil, tout de suite elle s’est transformée en Lune.
    Vers le soir la Lune était blanche, toute jolie.
    Et les hommes sont restés ébahis :
    c’était la tête qui s’était transformée en Lune.

    (d’après un mythe cashinawa, cité par Joseph Ki-Zerbo dans Compagons du soleil, Anthologie de grands textes de l’humanité sur les rapports entre l’homme et la nature, La Découverte/UNESCO, 1992)

    novembre 21, 2009 à 14 h 05 min

  8. LE GRAND MAITRE DES ESCARGOTS ET LE PETIT DIEU SYPHILITIQUE

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, le premier soleil (le soleil d’eau) fut emporté par l’inondation. Tous ceux qui vivaient en ce monde furent alors changés en poissons.

    Le deuxième soleil fut ensuite dévoré par les jaguars, le troisième anéanti pas une pluie de feu qui calcina les gens et le quatrième (le soleil de vent) effacé par la tempête qui changea hommes et femmes en singes qui s’enfuirent dans les montagnes.

    Les dieux, préoccupés se réunirent à Teotihuacan :
    — Qui va se charger de nous apporter l’aube ?

    Le Grand Maître des Escargots, célèbre par sa force et par sa beauté, s’avança :
    — Je serai le soleil, dit-il.
    — Y a-t-il d’autres candidats ?
    Silence.
    Tous regardèrent le Petit Dieu Syphilitique, le plus laid et le plus infortuné des dieux, et décidèrent :
    — Toi.

    Le Grand Maître des Escargots et le Petit Dieu Syphilitique se retirèrent dans les collines devenues aujourd’hui les pyramides du soleil et de la lune. Il y jeûnèrent et y méditèrent.

    Plus tard, les dieux rassemblèrent du bois, dressèrent un immense bûcher et les convoquèrent.

    Le Petit Dieu Syphilitique prit son élan et sauta dans les flammes. Il réapparut aussitôt après, en plein ciel, incandescent.

    Le Grand Maître des Escargots regarda le brasier en fronçant les ourcils. Il s’avança, recula, s’arrêta. En fit deux fois le tour. Comme il ne se décidait pas, il fallut le pousser dedans. Il tarda longtemps à s’élever dans le ciel. Les dieux, furieux, le giflèrent. Ils le frappèrent tant et tant au visage (avec un lapin !) qu’il en perdit tout son éclat.

    C’est ainsi que le hautain Grand Maître des Escargots se mua en lune.
    Les taches qu’on voit sur elle sont les cicatrices laissées par le châtiment.

    (d’après un mythe sud-américain, citée par Joseph Ki-Zerbo dans Compagnons du soleil, Anthologie de grands textes de l’humanité sur les rapports entre l’homme et la nature, La Découverte/UNESCO, 1992)

    novembre 22, 2009 à 22 h 18 min

  9. LA COLERE DE GANESH

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, vivait un petit dieu à tête d’éléphant (depuis que son père Shiva l’a décapité dans une crise de colère et a remplacé sa tête par celle du premier être vivant venu) nommé Ganesh.

    C’était un enfant joyeux, terriblement gourmand et qui aimait courir les chemins en chevauchant un rat.

    Un jour, alors qu’il grignotait des gâteaux de riz sucré, un serpent sur la route effraya le rat qui se cabra. Ganesh dégringola et son ventre, dans sa chute, éclata, laissant échapper les gâteaux. Sans se démonter, l’enfant dieu les ramassa, les fourra dans on abdomen, agrippa le serpent et s’en servit comme ceinture pour boucler son petit bedon.

    Voyant cela, le dieu Lune et ses épouses les Etoiles éclatèrent de rire. Furieux, Ganesh s’arracha une défense et la lança contre le rieur. Lune devint tout noir et ses épouses aussi. Plus aucune lumière pour éclairer la nuit.

    Les autres dieux eurent beau insister et demander à Ganesh de pardonner, celui-ci ne cèda qu’à moitié et au bout de dix mille ans. Les Etoiles furent épargnées mais Lune fut condamné à perdre son éclat la moitié de son cycle.

    Ganesh, quant à lui, ne récupéra pas sa défense perdue.

    (d’après Catherine Clément, Eloge de la nuit, Albin Michel, 2009)

    novembre 23, 2009 à 21 h 19 min

  10. LES JUMEAUX

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, deux jumeaux naquirent sur une barque. Enveloppé d’une humidité qui ne voulait pas sécher, l’un frissonnait en permanence, tandis que l’autre, la peau brûlante, crevait de chaleur. Le premier avait le teint pâle, le second était tellement bronzé qu’il était presque noir. L’un s’appelait Lune — au masculin — l’autre Soleil.

    Sitôt nés, plus moyen de les séparer. Forcément : le frileux voulait se réchauffer, le brûlant voulait se rafraîchir ! Mais ils s’aimaient si fort, ils étaient si violemment attirés l’un vers l’autre que le Piroguier s’en mêla. Il fallait bien quelqu’un pour les mettre à distance.

    Au milieu de la barque, le Piroguier installa Soleil d’un côté, Lune de l’autre, en leur interdisant de se rejoindre. Si, par malheur, les jumeaux y parvenaient, oh, alors… imaginez un peu : le froid et le chaud mélangés, la nuit et le jour mêlés !

    […] Feu, inondation, cataclysmes, tels sont les effets de la fatale conjonction entre une et Soleil. Car l’inceste est néfaste, surtout entre jumeaux dont l’un brûle et l’autre noie. Désormais, le Piroguier surveille les jumeaux, maintenant la distance entre Soleil et Lune, le temps, pour son embarcation, de voguer en accomplissant entièrement le tour de la planète.

    (d’après Eloge de la nuit de Catherine Clément, Albin Michel, 2009)

    novembre 25, 2009 à 11 h 09 min

  11. 120

    Ecrit par Catherine Clément

    Développés dans les Mythologiques par Claude Lévi-Strauss, des mythes amérindiens racontent en de nombreuses versions l’impossible rencontre entre le soleil et la lune — on ne connaît pas de plus grand danger.

    (Eloge de la nuit, Albin Michel, 2009)

    novembre 25, 2009 à 11 h 14 min

  12. Un peu Peau-Rouge, donc, le Fou chantant ?

    novembre 25, 2009 à 11 h 20 min

  13. 120

    Ecrit par Marcel Hénaff :

    (sur les mythes évoquant l’inceste)

    […] Bien que Lévi-Strauss ne le fasse pas, on peut ici revenir aux précieuses indications qu’il fournit lui-même dans les Structures élémentaires […] à propos de fautes que des populations forestières de Malaisie considèrent comme graves et relevant de la catégorie de l’inceste : dormir (pour un père) trop près de sa fille, rire de sa propre image dans un miroir, parler bruyamment, habiller un singe comme un humain et s’en moquer. Ce qui est incestueux dans ces cas ne se rapporte pas tant à un tabou sexuel c’est le fait de ne pas respecter l’existence et le droit de l’autre ; l’interdit est d’abord une règle positive de réciprocité ; il vise à assurer que l’autre soit reconnu et puisse répondre ; il faut donc protéger l’altérité de son image impuissante ou celle du singe qui ne peut se défendre ou encore garantir l’échange de paroles que le bruit peut étouffer. Ces raisonnements sont d’une admirable cohérence. Ainsi l’éclispe apparaît comme un inceste entre Soleil et Lune : la nécessaire distance et la différence sont menacées […]

    Il faut donc conclure — même si Lévi-Strauss ne le fait pas explicitement — que […] la réciprocité est au coeur de tout le dispositif de pensée que constitue le réseau des mythes ici analysés. Le monde que l’on ordonne et que l’on connaît est d’abord un monde où l’on se respecte et où l’on se reconnaît.

    Ce rappel — même limité — d’un exemple d’ensembles mythiques peut au moins nous donner une idée de la fécondité méthodologique de l’approche de Lévis-Strauss : elle permet d’abord de comprendre la cohérence des récits sous leur apparente absurdité ; elle les reçoit comme ils se donnent : comme des dispositifs de pensée qui prennent en charge le monde donné, formulent les exigences de la vie commune, envisagent toutes les relations entre humains et non-humains [•••]

    (Claude Lévi-Strauss, le passeur de sens, Perrin, 2008)

    novembre 25, 2009 à 11 h 51 min

  14. Les mythes pointant les dangers de l’inceste comme forme « primitive » des droits de l’homme ?
    J’aime beaucoup l’idée… pas vous ?

    novembre 25, 2009 à 11 h 54 min

  15. J’te répondrais volontiers, mais cela ne risque-t-il pas de casser la « bonne distance » qu’il vaudrait mieux garder entre nous ?

    novembre 25, 2009 à 11 h 56 min

  16. T’inquiète, je ne rigolerai pas… même si tu est habillé comme un humain !
    😉

    novembre 25, 2009 à 11 h 57 min

  17. Crâo

    Vous n’auriez pas un rapport un peu incestueux, tous les deux, par hasard ?

    novembre 25, 2009 à 22 h 03 min

  18. LES DEUX EPOUSES

    Dans ma tribu, on raconte qu’au tout début du temps d’avant, il y a belle lurette, la terre était un vaste désert de boue lisse. Dieu seul vivait dans le ciel noir, et il s’ennuyait beaucoup. C’est pourquoi il prit dans sa main une boule de boue et fit un homme qu’il appela Lune.

    Mais Lune s’ennuya à son tour. Dieu lui fit donc une épouse qui s’appelait Etoile-du-matin.
    — Je te la donne pour deux ans, lui dit Dieu. Dans deux ans, elle reviendra vivre dans le ciel près de moi.

    Etoile-du-matin descendit du ciel avec un précieux cadeau : elle portait, dans ses mains, le feu. Elle le déposa au milieu de la hutte de Lune et se coucha. Lune se coucha près d’elle et ils firent l’amour. Le lendemain, -du-matin était enceinte. Elle sortit de la hutte, s’agenouilla sur la terre boueuse et mit au monde les arbres, les plantes, les savanes qui se répandirent sur la terre. Le soleil se leva sur une terre verte, hospitalière et belle et Lune et son épouse Etoile-du-matin connurent le bonheur et l’abondance.

    Deux ans passèrent ainsi. ALors Dieu rappela Etoile-du-matin dans le ciel, et Lune fut à nouveau très malheureux. Il pleura pendant huit jours. Le neuvième jour, Dieu eut pitié de lui :
    — Ne te désole pas ainsi, dit-il, tu m’attristes. Je te donne une seconde épouse. Elle s’appelle Etoile-du-soir. Elle vivra deux ans avec toi. Mais dans deux ans, homme, tu devras mourir.

    Etoile-du-soir descendit du ciel et se coucha dans la hutte, près du feu. Lune dormit avec elle, et le lendemain, le ventre d’Etoile-du-soir était tout rebondi. Alors elle sortit devant la hutte, s’agenouilla dans l’herbe et mit au monde les antilopes et les oiseaux, des garçons et des filles. Lune fut très content, si content que le soir venu devant le feu, il voulut encore dormir avec Etoile-du-soir. Mais Dieu lui dit :
    — Ce soir, tu te coucheras de l’autre côté du feu.

    Lune en ronchonnant fit semblant d’obéir, mais dès que Dieu eut le dos tourné, tout doucement, il vint se coucher près d’Etoile-du-soir et fit encore l’amour avec elle. Le lendemain, Etoile-du-soir mit au monde les tigres, les léopards, les serpents, les scorpions, toutes les bêtes malfaisantes qui rampent et qui tuent sur la terre. Dieu, penché au bord du ciel, se désolé. Il dit à Lune :
    — Je t’avais prévenu. Tu ne m’as pas écouté, tant pis pour toi.

    Lune, insouciant, haussa les épaules. La terre était vaste, sa femme était belle, ses enfants innombrables, qu’importaient les tigres et les scorpions.

    Or, du haut du ciel, Etoile-du-matin, sa première épouse, était très jalouse d’Etoile-du-soir, que Lune semblait aimer plus fort qu’il ne l’avait aimée aux premiers temps du monde. Elle se fit malfaisante : elle interdit à la pluie de tomber sur la terre. Aussitôt, les innombrables enfants de Lune crièrent famine.
    — Votre père est seul coupable de vos malheurs, car il m’a oubliée, leur dit Etoile-du-matin, assise sur un petit nuage blanc dans le ciel trop bleu.
    Alors les fls de Lune se révoltèrent. Pour que revienne la pluie, l’aîné empoigna son père, l’étrangla et le jeta dans l’océan.

    Mais le soir venu, Lune sortit des vagues et s’éleva dans le ciel. Il chercha partout Etoile-du-matin pour se venger d’elle, et ne la trouva pas. Il la cherche encore maintenant, toutes les nuits. Sa face ronde et jaune traverse le ciel, poursuivant Etoile-du-matin qui lui donna tant de bonheur au premier soir, dans sa hutte devant le feu. C’est ainsi que se fit le monde.

    (d’après un conte africain, cité par Henri Gougaud dans L’arbre à soleils, Légendes du monde entier, Seuil, 1979)

    décembre 2, 2009 à 12 h 55 min

  19. Isidore

    LA LUNE A PERDU SON CHEMIN

    Ce soir, la lune a perdu son chemin,
    Elle s’est égarée dans le ciel sans fin,
    Sans savoir pourquoi, sans savoir comment;
    Elle a suivi une étoile de passage,
    Une étoile filante qui passait par là,
    Sans savoir pourquoi, sans savoir comment;
    Prenant la tangente, quittant son orbite,
    Elle a pris le pli d’un nouveau départ,
    Un nouvel élan vers le firmament,
    Sans savoir pourquoi, sans savoir comment.

    Tout étonnée de cette liberté
    Surgie de nulle part, cueillie par hasard,
    Tout au fond là-bas, tout là-bas si loin,
    Le cœur content, la face réjouie,
    Elle s’est envolée vers l’Eternité
    Tout au fond là-bas, tout là-bas si loin;
    Remerciant alors la grâce accordée,
    Elle a fait jaillir au cœur de la nuit
    Un bouquet d’étoiles, un vrai feu de joie
    Tout au fond là-bas, tout là-bas si loin.

    Alors le soir, le soir abandonné
    Dans la nuit sans nom, l’implacable nuit,
    Peut-être à jamais, peut-être pour toujours,
    Alors le soir, voyant disparaître
    Sa douce clarté, sa lueur blafarde
    Peut-être à jamais, peut-être pour toujours,
    Le soir découvrit la désolation,
    L’insondable ennui d’un cœur délaissé
    Dans l’obscurité de la nuit glacée
    Peut-être à jamais, peut-être pour toujours.

    Il prit alors dans un repli du temps
    Une petite pincée d’un beau sable gris,
    Sable du sommeil, sable de nos rêves;
    Il le jeta sur la terre endormie
    En une pluie d’argent embrasant le ciel,
    Sable du sommeil, sable de nos rêves;
    Et fit de la terre cet écrin de rêves,
    Temple du sommeil, joyau de lumière,
    Pour consolation de longues nuits sans lune,
    Sable du sommeil, sable de nos rêves.

    décembre 15, 2009 à 15 h 27 min

  20. Nawa !

    décembre 15, 2009 à 17 h 20 min

  21. C’est toi qui l’a écrit, Isi… ou ton Hihihaha ? 😉

    décembre 15, 2009 à 17 h 21 min

  22. Isidore

    Je crois que si c’était mon Hihihaha, ce serait plus fluide et plus musical… bref, plus poétique. Mais bon, on fait c’qu’on peut.

    décembre 16, 2009 à 9 h 08 min

  23. En tout cas moi j’le trouve « fluide et musical » et puis surtout bien vu : avec ces mouvements complexes (croissance/décroissance, montée/descente, apogée/hypogée, etc…), la Lune donne vraiment l’impression de n’en faire qu’à sa guise ou de… « perdre son chemin »

    décembre 16, 2009 à 12 h 10 min

  24. Isidore

    Merci, c’est fort aimable.

    décembre 16, 2009 à 14 h 32 min

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